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Infertilité

De l’image à la clinique

Publié le 11 mar 2019Lecture 7 min

Exploration de la fertilité féminine : place centrale de l’échographie en première intention (Fertiliscan©)

Nathalie MASSIN, Jean-Marc LEVAILLANT, Unité de médecine de la reproduction, CH intercommunal de Créteil, Créteil

L’exploration, à la recherche de la cause d’une infertilité, est légalement obligatoire avant toute prise en charge (Guide des bonnes pratiques en assistance médicale à la procréation (AMP) – arrêté du 30 juin 2017(1) modifiant l’arrêté du 11 avril 2008(2)). Celle-ci est en effet indispensable pour poser les bonnes indications aux différentes techniques d’AMP.

De fait, l’exploration tubaire doit être réalisée d’emblée dans le bilan du couple infertile, tout comme le spermogramme. L’état tubaire est un facteur limitant compte tenu de sa fréquence et de son impact sur la prise en charge ultérieure. Thonneau et al. rapporteny dans une grande cohorte française que 26 % des femmes infertiles présentent des anomalies tubaires(3). Cœlioscopie Le gold standard pour l’exploration tubaire est la cœlioscopie, avec épreuve au bleu. Elle permet le diagnostic et le traitement de l’endométriose et des adhésions péritubaires. Cependant, c’est une technique invasive et onéreuse, nécessitant une anesthésie générale, et Chapron et al. ont rapporté 0,5 % de complications chirurgicales(4). La réalisation d’une chirurgie a minima telle que la fertiloscopie reste une technique chirurgicale et n’est disponible que dans certains établissements. La chirurgie n’est pas adaptée en examen de routine chez la femme infertile. Elle doit rester un acte de deuxième intention lorsqu’on a dépisté une femme à risque d’anomalie. Hystérosalpingographie L’examen le plus communément prescrit est une hystérosalpingographie (HSG). En plus d’évaluer la perméabilité tubaire, l’HSG permet également d’avoir une image de la cavité utérine. Compte tenu de son coût relativement faible, l’HSG remplit les critères d’un examen de première intention. Cependant, elle présente plusieurs risques : exposition aux radiations ionisantes (exposition de 2,05 Gy cm2, comparativement à 0,09 Gy cm2 pour une radiographie du thorax), allergie à l’iode et complication infectieuse (péritonite). Elle présente également l’inconvénient majeur d’être mal tolérée à cause des douleurs pelviennes lors de la réalisation de l’examen. Enfin, si sa spécificité est bonne pour dépister une anomalie tubaire ou une pathologie tubaire bilatérale, de 87 et 95 % respectivement, sa sensibilité est faible, de 53 et 46 % respectivement, comparée à la cœlioscopie(5). Échographie endovaginale Grâce à l’amélioration technique, l’échographie endovaginale est aujourd’hui plus précise que l’HSG pour établir la perméabilité tubaire et a l’avantage supplémentaire d’explorer l’ensemble du pelvis dans le même temps. L’échographie, comparée à l’HSG, permet également une meilleure analyse des anomalies cavitaires. Échographie versus cœlioscopie L’HyCoSy (hysterosalpingo-contrast-sonography) ou l’HyFoSy (hysterosalpingo-foam-sonography) sont très facilement réalisées au cabinet, sans nécessité de service de radiologie ni de produit de contraste iodé. L’échographe utilisé pour cette procédure doit être équipé d’une sonde vaginale, de préférence 3D, afin d’obtenir une coupe frontale parfaite pour l’exploration utérine, et équipé d’une imagerie 2D précise pour l’étape « perméabilité tubaire ». La formation est facilement accessible à tout praticien réalisant habituellement des échographies pelviennes endovaginales et l’examen est très bien toléré par les patientes. Van Schoubroeck et al. ont montré que 48 % des femmes estiment que l’examen n’est pas douloureux et 33 % que l’inconfort est identique à celui de l’échographie vaginale de base(6). Quant à la comparaison avec l’HSG, une étude randomisée contrôlée de Dreyer et al.(7) montre que l’HyFoSy est à la fois moins douloureuse, avec une cotation moyenne de la douleur sur l’échelle visuelle analogique (EVA) de 1,7 versus 3,7, et a également l’avantage d’être plus rapide, avec une durée de 5 minutes versus 12,5 minutes pour l’HSG. Techniques comparées L’HyCoSy est réalisée avec du sérum et de l’air (contrast), alors que l’HyFoSy est réalisée avec un gel mousseux (foam), qui apporte une meilleure stabilité de l’air dans le gel pour le contraste lors de l’examen. Une étude observationnelle très bien menée de Ludwin et al.(8) a comparé l’HyCoSy et l’HyFoSy avec le test au bleu de methylène par cœlioscopie chez 132 femmes (259 trompes), chacune ayant les 3 examens. Les patientes n’étaient pas sélectionnées et la prévalence de l’obstruction tubaire dans la population était de 6,9 % des trompes. Cette étude retrouve une excellente valeur prédictive négative de 99 % pour les 2 examens par échographie, c’est-à-dire que la mise en évidence d’un passage tubaire avec l’HyCoSy ou l’HyFoSy correspond à une trompe perméable confirmée par l’épreuve au bleu. HyCoSy ou HyFoSy ? Cependant, la valeur prédictive positive de l’HyCoSy est significativement plus faible que celle de l’HyFoSy (30 % versus 71 %) entraînant plus d’examens non concluants ou sans passage tubaire avec l’HyCoSy, alors que le bleu est positif. L’utilisation du gel (Exem® gel) permet donc d’améliorer la sensibilité de l’examen. L’HyFoSy doit donc être privilégié en première intention, ou systématiquement réalisé en cas de non-mise en évidence d’un passage tubaire avec l’HyCoSy. Compte tenu de l’innocuité du gel, l’HyFoSy devrait être fait d’emblée, même si certains auteurs(8) ont proposé de le faire en deuxième intention après l’HyCoSy, la douleur ou l’inconfort de la patiente étant proportionnels à la quantité de liquide injecté(9). Un temps pour tout Tout comme l’HSG, l’HyFoSy doit être réalisé à un moment précis du cycle, d’une part, pour éviter le risque d’exposition d’une grossesse et, d’autre part en raison du risque plus élevé de faux positif (trompe obstruée) en cas d’endomètre trop épais, compliquant le passage du gel dans l’ostium. Il est donc recommandé de pratiquer cet examen après la fin des règles et avant la prolifération trop importante de l’endomètre, soit entre J5 et J9. Si une absence de passage est retrouvée avec un endomètre épais, compte tenu de la bonne tolérance de l’examen, il est possible de le reprogrammer en tout début de phase folliculaire du cycle suivant, pour éviter ainsi une exploration complémentaire plus invasive. En cas de passage tubaire, compte tenu de la spécificité quasiment de 100 % de l’HyFoSy, les trompes peuvent être considérées comme fonctionnelles et il n’est pas nécessaire de réaliser un examen complémentaire. En dernier recours d’exploration de la fertilité En cas d’anomalie, la décision de réaliser une cœlioscopie complémentaire doit tenir compte de l’âge de la femme, des antécédents et de la durée d’infertilité, ainsi que du spermogramme du conjoint, qui doit également être réalisé en première ligne de l’exploration du couple infertile. Dans certains cas, en particulier liés à l’âge, compte tenu des chances diminuées de fertilité spontanée, la cœlioscopie avec épreuve au bleu a moins d’intérêt dans son rapport bénéfice/coût. Dans ces conditions, il est préférable d’orienter d’emblée le couple vers la réalisation d’une fécondation in vitro (FIV). Plusieurs auteurs, comme Lim et al., suggèrent que l’HSG n’a plus sa place dans l’exploration moderne de la femme infertile(10). Les étapes post-échographie L’avantage de l’échographie en examen de première intention est non seulement son exploration fiable et rapide de la perméabilité tubaire, mais également l’évaluation très précise de l’utérus et de la cavité utérine ainsi que des annexes. Ainsi, avec un examen bien conduit, le clinicien dispose d’une analyse précise, à la fois morphologique et fonctionnelle, des ovaires, de l’utérus et des trompes, lui permettant d’orienter d’éventuelles explorations complémentaires, ou d’emblée une prise en charge en assistance médicale à la procréation. Le graphique ci-dessous résume l’exploration « moderne » du couple infertile en 2017. Le Fertiliscan© L’échographie de première intention dans le bilan d’infertilité, ou Fertiliscan©, se réalise en 3 étapes, prenant au total une trentaine de minutes et pouvant être réalisé au cabinet. Il fait gagner plusieurs semaines au couple, soit 1 h versus 13 semaines pour une exploration « classique », et présente également un avantage financier évident, avec un coût allant du simple au triple(11). L’examen débute par une échographie pelvienne endovaginale qui va évaluer les ovaires et l’ensemble du pelvis, et s’assurer de l’absence de contre-indication à réaliser une injection intra-utérine, en particulier l’existence d’un hydrosalpinx. La sonde endovaginale est ensuite retirée pour poser le spéculum et placer un cathéter (cathéter de transfert comme par exemple Elliocath®, avec ou sans système de contention) à l’orifice interne du col, monté avec une seringue contenant du sérum physiologique. Le spéculum est ensuite remplacé par la sonde endovaginale et l’hystérosonographie (Hysono) est réalisée pour évaluer la cavité utérine. Dans la foulée, le sérum restant dans la cavité est aspiré et la seringue est remplacée par une seringue contenant l’Exem® gel. Le cathéter est poussé au fond de la cavité utérine et l’HyFoSy est réalisée. Un compte-rendu type est ensuite remis à la patiente. Il doit comporter tous les éléments cités dans le tableau ci-dessous, avec les clichés échographiques correspondants. En 2017, l’échographie pelvienne endovaginale est un examen incontournable de l’exploration de l’infertilité chez la femme. Elle doit être réalisée par un praticien formé à l’exploration spécifique de la fertilité. Sa place se situe en première ligne dans la stratégie diagnostique et permet d’orienter ensuite vers des explorations complémentaires si nécessaire, ou d’emblée vers une technique d’assistance médicale à la procréation.

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